Un Prophète, réalisé par Jacques Audiard

Publié le par pL


GRAND PRIX ­­–  FESTIVAL DE CANNES 2009

9 CESAR 2010 DONT MEILLEUR FILM, MEILLEUR REALISATEUR, MEILLEUR ACTEUR (TAHAR RAHIM), MEILLEUR ACTEUR DANS UN SECOND RÔLE (NIELS ARESTRUP), MEILLEUR SCENARIO ORIGINAL ET MEILLEUR ESPOIR MASCULIN (TAHAR RAHIM)

Jacques Audiard est le cinéaste de la réunion du cinéma français, l’un des seuls à pouvoir réaliser un film à la fois accessible à un large public et cinématographiquement très exigent. Comme dans ses précédents longs métrages, sa réalisation est d’une très grande précision et sa direction d’acteurs brillante (après avoir su tirer le meilleur de Romain Duris, il révèle Tahar Rahim). Un prophète suit le parcours en prison de Malick, en optant pour des plans toujours très rapprochés. Le style, évoquant beaucoup De battre mon cœur s’est arrêté, traduit ici parfaitement l’enfermement et parvient, malgré quelques longueurs, à maintenir une ambiance oppressante. Un prophète est un film tendu, rappelant aussi le meilleur du film noir américain par ses airs scorsesiens, et malgré l’actualité de son propos (les débats sur l’horreur des prisons françaises surpeuplées et les conditions de détention n’ont jamais été si présents), Jacques Audiard refuse le film politique engagé. C’est peut-être sa plus grande force : décrire le quotidien en prison avec un grand réalisme et sans en atténuer la violence tout en refusant de se limiter seulement à une dénonciation.

Il y a bien des agents corrompus, des pratiques critiquables et une survie compromise dans l’univers carcéral que dessine Audiard, cependant Un prophète est un film bien plus ouvert, et c’est d’abord le récit d’un apprentissage. Lorsqu’il entre dans le champ, au moment de son incarcération, Malick est un personnage vierge. Audiard ne s’intéresse pas à son passé, ne se demande pas pourquoi il est là mais plutôt que va-t-il faire à présent. C’est un corps qui va devoir se construire dans un nouvel univers régi par des codes spécifiques. Dans De battre mon cœur s’est arrêté, Tom, un agent immobilier véreux s’affranchissait de la figure paternelle pour se construire et essayer de mener la vie de pianiste dont il rêvait. Dans Un prophète, il est également question d’initiation puis d’affranchissement. Pour survivre en prison, Malick devra choisir un clan, et c’est le chef des Corses (Niels Arestrup, épatant) qui le protègera en échange de sa fidélité. Malick va apprendre à lire, saisir et appliquer les règles du nouvel univers dans lequel il est plongé, et progressivement pouvoir voler de ses propres ailes et s’imposer comme un leader en milieu carcéral. Parce qu’Audiard a refusé de fermer son film, Un prophète dépasse son sujet premier et s’évade même de son lieu unique : la prison apparaît alors comme une métaphore de la société contemporaine dont le cinéaste décrit les maux avec une grande subtilité, du communautarisme qui ne veut pas dire grand-chose à la division en forts et faibles, en meneurs et suiveurs. Si Audiard signe un film noir tendu, une histoire de gangster prenante magistralement mise en scène, son Prophète hante longtemps les esprits en raison des multiples analogies qu’il propose et qui font de lui un film bien plus qu’un film de prison maîtrisé.

15/20

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Vous avez réagi:

Ecrit par dasola le mer 23 sep 2009 - 21h35

Rebonsoir, Un prophète est le film français de l'année. Je suis contente qu'Audiard continue de faire un parcours sans faute. Bonne soirée.
Ecrit par Alastor le sam 19 sep 2009 - 20h37
Je suis d'accord avec Pl, y'a des longueurs sur la fin mais il n'empêche qu'un film français ne m'avait pas enthousiasmer comme ça depuis longtemps! Voir un film pas intello mais en même temps pas politique ou trop social (ou trop beauf), je croyais que c'était impossible en france et apparament non!
Pour Là haut je l'ai aussi trouvé très bon, mature dans le scénario (et j'apprécie les films qui ne prennent pas les jeunes spectateurs pour des cons), époustouflant visuellement, drôle comme rarement les films de Pixar savent l'être....
Ecrit par pL le jeu 17 sep 2009 - 23h27
Pour Un prophète, honnêtement, je m'attendais à une plus grosse claque. Quelques longueurs notamment vers la fin... D'où le 15/20 puisque ça reste un excellent film, maîtrisé et percutant... mais je m'attendais à mettre 17 moi aussi!
Pour Girlfriend Experience, c'est vrai que c'est un peu long... Mais c'est une expérience intéressante.
Ecrit par Eric le jeu 17 sep 2009 - 23h05
-Pour le Prophète, je suis entièrement d'accord avec toi, même si j'ai l'impression que la claque a été plus lourde pour moi ! perso la note ressemblerait plus à du 17/20.
-Pour The Girlfriend Experience pareil aussi, même si j'ai malheuresement ressenti pas mal d'ennui pendant la séance (10/20)
-J'ai adoré Là Haut par contre... pour moi le meilleur film d'animation de l'année !
quand à l'abominable vérité, "même si tu me payes..." tu connais la chanson.

 

Publié dans Critiques de 2009

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J
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