The Wrestler, réalisé par Darren Aronofsky

Publié le par pL

Alors qu’il avait jusqu’ici signé des films privilégiant les images très travaillées captées selon des angles de prise de vue inattendus, Darren Aronofsky opte pour le réalisme (cadre tremblant, pas de sur-stylisation de chaque plan) pour suivre le come-back d’une ancienne star du catch. Le générique, composé d’une multitude de photos décrivant le triomphe de Randy Robinson, suffit pour suggérer son glorieux passé, à jamais révolu. Dans The Wrestler, la caméra d’Aronofsky, privilégiant les plans rapprochés tout en conservant une grande pudeur, accompagne un personnage, souvent de dos, qui porte sur ses épaules le poids d’une vie brisée. Le cinéaste filme au plus près son corps abîmé par des cicatrices, signe des blessures tant physiques que psychologiques de cet homme qui va, une dernière fois, remonter sur le ring pour se sentir revivre.

Dans une magnifique séquence de catch, le montage alterné du combat et du soin des blessures à son issue retranscrit à la perfection la douleur de chacun des coups portés. Et, lorsqu’il est hors du ring, le combat que mène Randy pour retrouver sa dignité est tout aussi brutal. C’est parce qu’il privilégie l’émotion brute et sincère, en parfait accord avec sa réalisation sans fioriture, que The Wrestler touche en plein cœur, tant lors des matches où il réussit à faire ressentir le mal de son héros maltraité que lors de scènes plus intimes, notamment les retrouvailles avec une fille abandonnée, filmées avec justesse et sobriété. C’est aussi parce qu’il rend son personnage sympathique, drôle (voir les scènes où il se reconvertit en charcutier), parfois maladroit (la scène choix du cadeau pour Stéphanie déborde de tendresse), introduisant ainsi un peu de légèreté dans le film, que The Wrestler ne s’apitoie jamais sur son tragique sort pour faire pleurer dans les chaumières.

Enfin, le choc ne serait certainement pas le même sans l’acteur principal, Mickey Rourke, qui est de tous les plans. Cette histoire, on l’a déjà entendu partout, c’est la sienne. Alors que dans Sin City de Robert Rodriguez il conservait sur son corps d’innombrables pansements destinés à masquer ses blessures, l’acteur se met aujourd’hui à nu et se donne corps et âme pour incarner un catcheur tentant de réparer les erreurs du passé. Le film est cruel, sans espoir. Il décrit la déchéance d’une idole des années 1980 et si la fin tragique du catcheur est inévitable, à l’issue de ce chemin vers une rédemption impossible on ne retient finalement qu’une chose : non pas la mort digne du personnage Randy Robinson, mais la renaissance d’un immense acteur américain, au sommet de son art, que l’on souhaite désormais revoir régulièrement sur les écrans de cinéma.

16/20

Publié dans Critiques de 2009

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