Thirst, ceci est mon sang, réalisé par Park Chan-wook

Publié le par pL


PRIX DU JURY – FESTIVAL DE CANNES 2009

Réalisateur d’une trilogie sur la violence dont le film central (Old Boy) avait été très remarqué, Park Chan-Wook s’intéresse aujourd’hui au mythe du vampire dans Thirst, ceci est mon sang. Pour exposer son histoire atypique, il fait preuve d’une grande efficacité. Un prêtre se porte volontaire afin de servir de cobaye lors de l’élaboration un vaccin contre un virus mortel. Le prêtre ne survit pas à cette maladie, mais une transfusion sanguine le ramène mystérieusement à la vie : il se réincarne alors en vampire. Le découpage est précis, l’exposition est concise et prometteuse, offrant même de possibles interrogations sur des sujets sensibles, dont la confrontation de l’homme d’Eglise à deux péchés, le crime (il doit boire le sang des autres pour freiner l’apparition de boutons et autres brûlures sur son corps) puis le sexe. Voici les promesses d’un film ambitieux qui, passé cette introduction, se permet une nouvelle audace : emprunter le schéma narratif voire même certaines séquences de Thérèse Raquin de Zola…

Quand un roman naturaliste français se mêle au genre très codé du film de vampire devant la caméra d’un habile cinéaste coréen, cette relecture est des plus habiles et des plus intéressantes : Thirst, ceci est mon sang est l’exemple parfait d’une adaptation réussie, qui laisse visible sa source d’inspiration (comme chez Zola, il y a une noyade et le fantôme de l’ami/du mari noyé qui refait surface, une mère – ici Madame Ra, pour Raquin – paralysée essayant de révéler la vérité à des amis venus dîner puis assistant à la lente mort des amants maléfiques…) tout en la retravaillant, en la confrontant à d’autres influences, d’autres genres, d’autres styles et d’autres cultures (la rencontre entre orient et occident se retrouve jusque dans le choix des musiques) pour justifier son intérêt cinématographique. Comme toujours chez Park Chan-Wook, l’esthétique du film est plus que soignée : l’image est magnifiquement éclairée et parfaitement composée, ce qui donne des séquences vraiment mémorables, de la première rencontre nocturne entre le prêtre et l’épouse somnambule de son ami d’enfance à la formidable séquence de conclusion, lors de laquelle les deux vampires (deux personnages fascinants, minutieusement construits) aux intentions opposées (se cacher pour survivre ou se laisser mourir) luttent en plein désert avant le lever du soleil.

Toutefois, malgré ses indéniables qualités formelles, Thirst, ceci est mon sang n’est jamais loin de l’esthétisme un peu vain. Ce qu’il y a de plus désagréable dans ce film, c’est son inégalité, une séquence brillante pouvant succéder à une totalement ratée. Le grand brassage des genres initié par Park Chan-Wook trouve ses limites lorsque le cinéaste tente d’intégrer dans son projet quelques touches d’humour. L’ingrédient de trop dans cette proposition cinématographique déjà suffisamment riche, que l’irruption de comédie (de mauvais goût) ne fait qu’alourdir. Le grand point faible de ce film, dont on saluera quand même l’ambition et le courage de la démarche, Park Chan-wook affichant clairement sa volonté de proposer quelque chose de nouveau,  d’original et de très personnel.

13/20

Publié dans Critiques de 2009

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C
<br /> jamais vu à l'affiche chez moi<br /> <br /> <br />
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B
<br /> Salut,<br /> <br /> Effectivement ce "thirst" n'est pas la réussite annoncée mais tient bien la route...Pas indispensable.<br /> <br /> <br />
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