Jennifer's Body, réalisé par Karyn Kusama
Jennifer pourrait bien être un personnage inventé pour la sulfureuse Megan Fox, objet de tous les fantasmes depuis sa prestation de bimbo dans les deux volets de la saga Transformers. Dans le film de Karyn Kusama, elle incarne donc une lycéenne qui fait craquer tous les garçons qui la croisent, de ses camarades de classe au leader d’un groupe de rock. D’ailleurs, c’est lorsqu’elle va passer la nuit dans la caravane du chanteur qu’elle va se transformer en une créature qui, pour être belle, doit dévorer des hommes (au sens propre). Aidée par la scénariste de Juno, Diablo Cody, la réalisatrice se confronte à de multiples thématiques, d’autant qu’elle prend le risque de développer en parallèle un second personnage : Neddy, la pas très jolie amie d’enfance de Jennifer. Sous ses airs de parodie du film de vampire et du film d’adolescents, Jennifer’s body est ainsi bien plus riche que prévu.
Si la transformation de Jennifer en créature usant de ses charmes pour piéger les mâles qu’elle croise prouve que ce qui est beau ne l’est que parce qu’il est regardé, la fille de l’ombre, Needy, occupe une place de taille et amène la question du double, du rêve et de la réalité. Le schéma est connu : il y a d’un côté la brune et de l’autre la blonde, celle qu’on regarde et celle qu’on ignore, la créature de la nuit qui fascine et celle du jour qui indiffère. Même si cela ne semble pas son intention première, Jennifer’s body se lit comme une confrontation entre un idéal (« le corps de Jennifer » dit le titre) et la réalité, Jennifer et Needy étant deux facettes d’un même personnage, ce que revendique le montage alterné de deux scènes de sexe aux multiples échos ou la prise en charge de la narration par Needy… depuis sa cellule de prison.
Toutefois, Jennifer’s body ne pense pas toujours à nourrir ces différents sujets convoqués et à assumer une certaine complexité. Le film se contente trop souvent d’être une simple série B., efficace mais limitée. Il y a certes beaucoup d’audace et pas mal d’humour (clins d’œil amusants, des dialogues assez bien écrits…), des séquences habiles (l’affrontement en tenue de bal…) et des interprétations de qualité mais le film manque quelque peu de rigueur et demeure inégal : réellement divertissant et plutôt sympathique lorsqu’il joue la carte du teen-movie gore et sexy, nettement plus passionnant les quelques fois où il s’interroge réellement sur les questions impliquées par le choix d’un tel sujet…